Ce mois-ci, du 9 au 13 juin, se tient à Nice la Conférence des Nations Unies sur l’Océan. À l’occasion de cet événement international majeur, revenons sur le rôle fondamental que jouent les océans dans la régulation du climat et sur les menaces croissantes qui pèsent sur ces écosystèmes vitaux.

Les océans, au cœur de l’équilibre climatique
Les océans couvrent 70 % de la surface de la Terre et contiennent 97 % de l’eau disponible sur la planète. Ils sont l’un des régulateurs climatiques les plus puissants que nous ayons. Leur rôle commence par leur énorme capacité thermique : ils absorbent et stockent de vastes quantités de chaleur, qu’ils restituent progressivement, contribuant ainsi à atténuer les écarts de température saisonniers.
Les courants marins profonds, en redistribuant cette chaleur à l’échelle planétaire, influencent à la fois les climats régionaux et les grands systèmes météorologiques, y compris le cycle de l’eau, les précipitations, ou encore les tempêtes.
Les océans sont également un puits de carbone majeur :
-Ils absorbent environ 30 % des émissions de dioxyde de carbone (CO₂) produites par les activités humaines.
-Ils captent 90 % de la chaleur générée par ces émissions.
-Ils produisent 50 % de l’oxygène que nous respirons.
Ce CO₂ est absorbé par deux mécanismes complémentaires :
Le puits physique : le dioxyde de carbone se dissout dans les eaux de surface, en particulier dans les zones froides des hautes latitudes, avant d’être entraîné vers les profondeurs par les courants marins, où il reste stocké pendant des centaines, voire des milliers d’années.
Le puits biologique : le phytoplancton, par photosynthèse, capture le CO₂ et le transmet dans la chaîne alimentaire. À sa mort, une partie de ce carbone est enfouie dans les sédiments marins, où il reste sous forme minérale durablement.

Ce rôle de régulation est également assuré par des écosystèmes marins spécifiques, comme les mangroves, les récifs coralliens ou les herbiers marins, qui stockent de grandes quantités de carbone. Quant à la faune marine, elle participe à la bonne santé de ces puits de carbone à travers les interactions complexes entre espèces et la stabilité des écosystèmes.
Un équilibre menacé
Mais ce système remarquable est aujourd’hui en danger.
La surexploitation des ressources marines, la pollution, la destruction des habitats et les pratiques de pêche industrielle détériorent ces écosystèmes. Lorsqu’un milieu marin est dégradé ou détruit, le carbone qu’il contenait est relâché dans l’atmosphère, aggravant le changement climatique.
Autre problème : l’absorption du CO₂ par les océans, si elle nous protège en partie du réchauffement, engendre en retour un réchauffement et une acidification des eaux. L'océan absorbe, d'après l'UNESCO, 24 millions de tonnes CO₂ par jour !
Depuis le début de la révolution industrielle, le pH des océans (sachant que plus celui-ci est faible, plus l'acidité augmente) a déjà chuté de 0,1 unité : un changement rapide à l’échelle géologique, qui perturbe gravement la vie marine et qui risque encore de s'accroître.

Cette acidification :
-fragilise les coquilles et les squelettes calcaires (coraux, huîtres, etc.),
-ralentit la croissance de certaines espèces (crabes, homards),
-altère le comportement des poissons (odorat, orientation),
-et peut même modifier la propagation du son dans l’eau, rendant l’environnement plus bruyant.
À ces changements rapides, véritables facteurs de stress pour les écosystèmes océaniques, s’ajoutent d’autres pressions :
- L’eutrophisation, due à l’excès de nutriments (azote, phosphore), entraîne des zones mortes pauvres en oxygène, favorisant la prolifération d’algues nuisibles.
-La pollution plastique qui menace toute la chaîne alimentaire marine.
-La surpêche et les activités humaines en mer, source de surexploitation des ressources marines qui fait obstacle aux équilibres en place et à la richesse de la biodiversité marine.
On estime que 60 % des écosystèmes marins sont dégradés ou surexploités, et que plus de 50 % des espèces marines pourraient disparaître d’ici 2100.
Protéger les océans, c’est préserver l’humanité
Tous ces enjeux posent ainsi des problèmes pour la bonne santé de l’océan, et par réaction de chaîne, pour la santé humaine, qui dépend tant de ce rôle de régulation que de ressources alimentaires : l’océan et sa biodiversité fournissent en effet à notre communauté mondiale 15 % des protéines animales que nous consommons.
D’où l’intérêt majeur de comprendre le rôle essentiel qu’ils occupent et d'œuvrer à leur conservation.
Préserver l’équilibre des océans, c’est à la fois agir pour le climat, renforcer la résilience humaine et protéger la richesse exceptionnelle des écosystèmes marins.
Sources :
-Mémery, Laurent. « 12. Les océans, pièges à CO2 ». Le climat à découvert, édité par Catherine Jeandel et Rémy Mosseri, CNRS Éditions, 2011, https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.11361.
-Acidification des Océans, Surfrider Foundation, https://fr.oceancampus.eu/cours/acidification-des-oceans/
-L’Océan au coeur d'un sommet international à Nice – ONU France
-Les océans, régulateurs du climat mondial - Sciences et Avenir
-Le rôle des océans dans la régulation climatique - Projet Vert
-Stockage du carbone | CMEMS
-Carbon Dioxide Capture and Storage — IPCC
-Tout comprendre sur : l'acidification des océans | National Geographic
-Eutrophisation | CMEMS
-Acidification des océans: résumé à l'intention des décideurs, troisième Symposium sur l'océan dans un monde avec un taux élevé de CO2 - UNESCO Bibliothèque Numérique
